La reconstruction à l’identique en droit de l’urbanisme

08/10/2024

En matière d’urbanisme, le mécanisme de la reconstruction à l’identique permet de procéder à la reconstruction d’une bâtisse détruite ou démolie alors même qu’elle se trouve au sein d’une zone devenue inconstructible. Focus sur ce dispositif parfois méconnu en droit de l’urbanisme.

La reconstruction à l’identique est définie à l’article L. 111-15 du code de l’urbanisme :

« Lorsqu’un bâtiment régulièrement édifié vient à être détruit ou démoli, sa reconstruction à l’identique est autorisée dans un délai de dix ans nonobstant toute disposition d’urbanisme contraire, sauf si la carte communale, le plan local d’urbanisme ou le plan de prévention des risques naturels prévisibles en dispose autrement. »

Il convient d’analyser ces dispositions.

1. La reconstruction à l’identique doit concerner « un bâtiment régulièrement édifié ».

En effet, la construction détruite doit avoir eu une existence légale, c’est-à-dire qu’elle ne doit pas avoir été édifiée en méconnaissance des règles applicables à l’époque de sa construction. C’est au demandeur de le prouver. Pour cela, deux solutions existent :

  • Démontrer qu’elle a fait l’objet d’une autorisation d’urbanisme ;
  • Ou démontrer qu’elle a été érigée avant l’entrée en vigueur de la loi du 15 juin 1943. Cette loi rend l’obtention d’une autorisation d’urbanisme obligatoire. Par conséquent, toutes les constructions érigées avant son entrée en vigueur sont considérées comme régulières même si elles n’ont pas fait l’objet de permis de construire. Elles ne constituent pas des constructions sans permis au sens de l’article L. 421-9 5° du code de l’urbanisme.

Ensuite, le bâtiment concerné doit avoir été « détruit ou démoli ». Cela peut résulter d’un sinistre ou d’un acte volontaire du propriétaire.

En effet, le juge administratif a pu estimer que : 

« 4. Considérant que l’article L. 111-3 du code de l’urbanisme ne soumet plus, depuis sa modification par l’article 9 de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures, le droit de reconstruire un bâtiment à la condition que la démolition soit consécutive à un sinistre ; que, dès lors, en opposant au projet litigieux de reconstruction du bâtiment qui existait sur le terrain d’assiette du projet litigieux le motif tiré de ce que la démolition de ce bâtiment a été réalisée volontairement, le maire a commis une nouvelle erreur de droit ; » (CAA Lyon, 1er octobre 2013, n° 13LY00315)

2. La nouvelle construction doit être « identique » à l’ancienne :

Toutefois, la jurisprudence a déjà pu estimer que de légères modifications pouvaient être tolérées

Par exemple, il a été autorisé :

  • Le réaménagement des espaces intérieurs, sans création de surface supplémentaire ni modification du volume de la construction, et le remplacement d’un velux par un chien assis (CAA Nancy, 1ᵉʳ juin 2006, n° 04NC00320).
  • La création d’une fenêtre supplémentaire (CAA Lyon, 1er octobre 2013, n° 13LY00315).


Si les modifications sont trop nombreuses ou trop importantes il s’agit alors d’une nouvelle construction qui échappe au régime de l’article L 111-15 du code de l’urbanisme. Tel est le cas si le projet comporte par exemple un étage supplémentaire ou encore un emplacement radicalement différent.

En matière d’extension, il est seulement admis que les surfaces soient faiblement modifiées (par exemple, une surface hors œuvre brute (SHOB) de 678 m² portée à 690m² : TA Strasbourg, 30 novembre 2004, n°0300175). A contrario, un agrandissement trop important ne peut être regardé comme identique (CAA Marseille, 31 janvier 2007, n°06MA01827).

Toutefois, le juge administratif a déjà pu estimer que rien ne s’opposait à ce que le pétitionnaire puisse réaliser une extension dans la mesure où les règles d’urbanisme applicables au moment de la reconstruction l’autorisent (CE, 16 mai 2018, n°406645).

Et pour cause, les zones naturelles ou agricoles limitent souvent la constructibilité à la simple extension des bâtiments déjà existants. Dans ce cas, il est possible de procéder à une reconstruction à l’identique puis à une extension de la bâtisse reconstruite.

3. La reconstruction est possible « nonobstant toute disposition d’urbanisme contraire » :

Il s’agit là du principal intérêt du régime de la reconstruction à l’identique : la construction peut être autorisée quand bien même une nouvelle construction ne serait pas possible sur le terrain. En d’autres termes, la reconstruction à l’identique est possible même si le terrain sur lequel elle prend place est devenu inconstructible.

4. La reconstruction est possible « sauf si la carte communale, le plan local d’urbanisme ou le plan de prévention des risques naturels prévisibles en dispose autrement » :

Le législateur a permis aux rédacteurs des documents d’urbanisme de prévoir l’interdiction des reconstructions à l’identique. L’interdiction doit être explicite, suffisamment claire et justifiée.

Une réponse ministérielle précise à ce sujet :

« L’article L. 111-3 permet la reconstruction à l’identique d’un bâtiment détruit par un sinistre sauf si le document d’urbanisme en dispose autrement. Ces dispositions permettent de reconstruire des bâtiments sinistrés qui, régulièrement construits, ne respectent plus les dispositions d’un document d’urbanisme postérieur. Ainsi, le seul fait que le nouveau document d’urbanisme rende une zone inconstructible n’est pas suffisant pour interdire la reconstruction d’un bâtiment sinistré. Il faut en outre que la carte communale ou que le plan local d’urbanisme indique que la reconstruction à l’identique est interdite en cas de sinistre en justifiant les raisons d’une telle disposition. Une telle interdiction ne peut être motivée que par la nécessité d’une protection spéciale du lieu, par exemple un espace situé dans la bande littorale des cent mètres ou pour des raisons de sécurité. » (Rép. min. n° 87605 : JOAN 7 nov. 2006, p. 11674.)

5. Quelle autorisation d’urbanisme dans le cadre d’une reconstruction à l’identique ?

L’autorisation d’urbanisme nécessaire dépend de la nature du projet :

  • Les constructions soumises à permis de construire sont listées aux articles R. 421-14 à 16 et suivants du code de l’urbanisme ;
  • Les constructions soumises à déclaration préalable sont listées par les articles R. 421-9 à 12 et 17 et 17-1 du Code de l’urbanisme ; 
  • L’article R. 421-28 du code recense les constructions pour lesquelles une autorisation est nécessaire en cas de démolition.

Par ailleurs, la reconstruction à l’identique ne dispense pas le pétitionnaire de l’obtention d’un permis de construire (CE, 20 février 2002, n°235725). Par conséquent, une autorisation pourra être sollicitée en fonction de la nature du projet.

Par ailleurs, le projet nécessite-t-il l’obtention d’un permis de démolir ?

Sur ce point, l’article R. 421-27 du code de l’urbanisme précise que :

« Doivent être précédés d’un permis de démolir les travaux ayant pour objet de démolir ou de rendre inutilisable tout ou partie d’une construction située dans une commune ou une partie de commune où le conseil municipal a décidé d’instituer le permis de démolir. »

Ces dispositions permettent aux communes qui le souhaitent de contraindre les pétitionnaires qui souhaitent démolir une construction à l’obtention d’un permis de démolir au préalable.

Pour résumer, le mécanisme de la reconstruction à l’identique implique de :

  • Démontrer que le projet entre dans les conditions posées par l’article L. 111-15 du code de l’urbanisme ;
  • Déposer une demande d’autorisation d’urbanisme si celle-ci s’avère nécessaire.

Que ce soit en termes de conseil ou de contentieux, le cabinet est en mesure de vous accompagner dans le cadre de toute difficulté en matière d’urbanisme sur le secteur de la Côte d’Opale (Boulogne-sur-Mer, Berck, Calais, Dunkerque et alentours) et plus largement dans les Hauts-de-France.

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